La disparition forcée est une véritable arme de terreur dont usent les Etats afin de faire taire celles et ceux qu’ils ne veulent pas entendre. A cette réduction sous silence de leurs êtres chers, les familles répondent par une inlassable quête de vérité. Une journée internationale des victimes de disparition forcée ne peut rendre hommage à une lutte de toujours et de tous les instants. En effet, ce crime s'inscrivant tant dans l’espace et dans le temps, il impacte, de manière irréversible, la vie des familles, les conduisant à faire face au déni de justice et à l’impunité qui lui est inhérente. C’est pourquoi la FEMED a lancé sa campagne “Agir contre le déni de justice”, s'étendant sur une semaine à Paris, du 29 Août au 4 Septembre 2022. Couronnée de succès, cette campagne a rassemblé près de 400 personnes autour de la question des disparitions forcées durant toute la semaine.
La campagne a débuté le 29 Août 2022 avec l’évènement “ Disparition forcée, un crime contre l’humanité ”, durant lequel le film Y’a plus d’Amine, a été projeté à la Mairie du XXème arrondissement de Paris. Divers intervenants ont, par la suite, pu prendre la parole, afin de rendre compte de la teneur du crime de la disparition forcée en tant que violation grave des droits humains. Olivier de Frouville, membre du Comité contre les disparitions forcées ; Emmanuel Decaux, ancien président du GTDFI ; Jimena Reyes, avocate et directrice du bureau des Amériques de la FIDH ; et Ziad Majed, politologue et chercheur franco-libanais et professeur de l’Université américaine de Paris, ont ainsi débattu quant aux divers problématiques et enjeux entourant la définition de la disparition forcée.
Le 30 Août, sur la Place de la République, de nombreux militants, issus des quatre coins du monde, luttant contre le phénomène de la disparition forcée, se sont réunis en arborant des photos de disparus, lançant des slogans, chacun dans sa langue d’origine. Une performance musicale a été réalisée par le groupe Mariachi Femenil Arrieras Somos. Pour celles et ceux ne pouvant se joindre à cette initiative, un rassemblement en ligne a été mis en place, transformant le rassemblement national en réunion internationale, via la présence, physique ou à distance, d’associations provenant de Turquie, du Liban, d’Argentine, du Panama, d’Irak, d’Egypte et de nombreux autres pays, prouvant que la disparition forcée, loin de se cantonner à une unique région du monde, est une violation des droits humains pratiquée dans de nombreux Etats. C’est ainsi que, les jours suivants, la FEMED s’est focalisée sur chacune de ces régions, touchées par ce phénomène.
“ Le Moyen-Orient. Impunité d’hier et d’aujourd’hui ”
Le Moyen-Orient est une région où la disparition forcée, ainsi que d’autres violations aux droits humains tels que la torture, les exécutions extra-judiciaires ainsi que les détentions arbitraires, constitue une pratique systématique et généralisée dans la plupart des Etats. C’est dans ce contexte que, le 31 Août, la FEMED a invité différents experts et victimes directes ou indirectes de disparition forcée, à travers des témoignages poignants, démontrant la longévité de cette pratique.
“ Afrique du Nord. Je ne peux pas pardonner si on ne me demande pas pardon ”
Selon Auguste Rodin, “l’art est la plus sublime mission de l’homme, puisque c’est l’exercice de la pensée qui cherche à comprendre le monde et à le faire comprendre.” Expliquer l’atrocité de la disparition forcée et, à plus forte raison, dépeindre la souffrance des familles, est une tâche laborieuse. Toutefois, via l’exposition “Disparus”, en collaboration avec l’Atelier des artistes en exil, la FEMED a tenu à rendre hommage aux personnes disparues. Au cours du vernissage de l’exposition, c’est l’Afrique du Nord qui a été mise à l’honneur par Nassera Dutour, Rachid El Manouzi, Alla Hasi et Muhammed Ebaid, qui ont éclairé le public sur l’impunité régnant en Algérie, au Maroc, en Libye et en Egypte.
“ Amérique latine. Pourquoi les cherchons-nous ? Parce que nous les aimons. ”
Lors de l'événement centré sur l’Amérique latine, le 2 Septembre, la FEMED a projeté à la mairie de Paris, le film Au nom de tous mes frères, de Samuel Laurent Xu, portant sur la dictature militaire et les disparitions forcées au Chili. Dans les couloirs, étaient exposés une série de gravures de l’artiste mexicain Alfredo Lopez Casanova, intitulée “Grabar es resistir”, ainsi qu’une série d’œuvres de l’artiste mexicain Emilio Eduardo Padilla Villanueva, nommée “Apapachos”. La projection a été suivie d’un débat entre intervenants spécialistes de chaque pays d’Amérique latine, permettant ainsi de confronter l'expérience et les pratiques de disparitions forcées et de justice transitionnelle mises en place.
“ Europe. Disparitions forcées, un secret d'Etat”
Bien que le phénomène de disparitions forcées soit moins connu en Europe, le continent n’en est pas moins épargné et a même été le premier instigateur de cette pratique. Ainsi et afin de finir cette campagne, la FEMED a choisi de projeter le film Oubliés sous terre, de la réalisatrice Africa Moreno, traitant des fosses communes espagnoles.
S’en est suivi une intervention de Berivan Firat, militante du Conseil Démocratique du Kurdistan ; de Nuray Simsek, défenseuse des droits humains en Biélorussie et lauréate de l’Initiative Marianne ; ainsi que de Bachir Ben Barka, fils du disparu Mehdi Ben Barka.