En 2007, l’Algérie porte encore les lourdes cicatrices laissées par la guerre civile qui a défiguré le pays entre 1991 et 2002. Ce conflit, marqué par des violences extrêmes, des massacres et des disparitions forcées, a opposé l’État aux groupes armés islamistes, plongeant le pays dans une terreur généralisée. Des milliers de civils ont disparu sans laisser de trace, des familles entières ont été dévastées par l'incertitude sur le sort de leurs proches. Ces disparitions, souvent attribuées aux forces de sécurité et aux groupes armés, ont laissé un vide profond dans la société algérienne, et de nombreuses familles n’ont toujours pas de réponse sur ce qui est advenu de leurs êtres chers.
Après la fin officielle du conflit, le gouvernement algérien a mis en place, en 2005, la "Charte pour la paix et la réconciliation nationale". Cette initiative visait à mettre fin aux tensions et à permettre un retour à la paix. Elle offrait une amnistie aux auteurs de violences, y compris ceux responsables de graves violations des droits humains, à condition qu'ils ne soient pas directement impliqués dans des actes de terrorisme. Cependant, cette réconciliation a été largement perçue par les victimes et les défenseurs des droits de l’homme comme une tentative d’effacer les crimes passés sans offrir de justice ni permettre la vérité de voir le jour. Les responsables des disparitions forcées n’ont pas été jugés, et les familles des disparus n'ont toujours pas eu accès à des réponses claires sur ce qui est arrivé à leurs proches.
Aujourd’hui, les disparitions forcées demeurent largement non résolues. Des associations, telles que le Collectif des Familles de Disparus en Algérie (CFDA), continuent de dénoncer l’inaction de l’État et de réclamer des enquêtes indépendantes. Elles exigent la levée du secret qui entoure ces disparitions et demandent des éclaircissements sur le rôle joué par l’armée et les autorités dans ces événements. Le CFDA, soutenu par d'autres groupes de la société civile, milite pour l'ouverture des archives de la guerre civile et pour la mise en place de mécanismes de justice transitionnelle capables d'offrir une reconnaissance des souffrances vécues par les victimes et leurs familles.
En 2008, la quête de vérité et de justice restait un combat crucial pour les victimes et leurs familles, qui continuent de revendiquer la reconnaissance de leurs droits et la réparation des préjudices subis. La situation actuelle reflète un pays encore déchiré par les non-dits et les injustices du passé. Alors que la réconciliation a été privilégiée au détriment de la justice, la société algérienne se trouve à un carrefour. La volonté de tourner la page de la guerre civile sans enquêter sur les crimes perpétrés contraste avec la demande croissante de vérité, de justice et de mémoire, émanant des victimes et des organisations qui les soutiennent. La guerre civile et ses séquelles continuent de peser lourdement sur la société algérienne, et tant que la vérité ne sera pas établie, les cicatrices de ce conflit resteront ouvertes.
Source de la photo : Louafi Larbi / Reuters.