Après la réélection d'Alexandre Loukachenko le 19 décembre 2010, le président biélorusse a intensifié la répression contre l’opposition et la liberté de la presse. Loukachenko a remporté l’élection avec un résultat controversé de 80 % des voix, ce qui a provoqué une vague de manifestations contre les fraudes électorales. Le lendemain, il a menacé les journalistes en déclarant que "cette démocratie débile" était terminée et que la presse allait "payer pour chaque mot". Peu de temps après, le 27 décembre, le KGB a perquisitionné les bureaux du journal Nacha Niva, saisissant ordinateurs et archives. Ces perquisitions étaient liées à une enquête sur les leaders de l’opposition, et les autorités ont cherché à obtenir des images et des enregistrements des manifestations contre l’élection.
Les journalistes indépendants ont été particulièrement ciblés par la répression. Natalia Radina, rédactrice en chef du site Charter97.org, a été emprisonnée par le KGB sous prétexte de son implication dans l’organisation des manifestations. Sa fille a été maltraitée, subissant une commotion cérébrale après avoir été battue. D'autres journalistes, comme Iossif Siareditch du journal Narodnaïa Volia et Alekseï Saleï, photoreporter pour Glos Znad Niemna, ont été interrogés par les autorités qui cherchaient des preuves de liens entre l’opposition et les manifestations. En parallèle, Loukachenko a limogé des responsables médiatiques proches de son administration, accusés de ne pas avoir maîtrisé la communication autour de son élection, notamment Natalia Petkevitch et Alexandre Zimovski.
Les médias d’État ont également fait face à une pression croissante. Cependant, certains journalistes des chaînes officielles ont commencé à désobéir aux ordres du régime. Sergueï Darafeev, une figure de la télévision biélorusse, a dévoilé des vidéos de fraude électorale forcée, montrant des étudiants contraints de participer au vote anticipé, ce qui a contribué à la montée des critiques contre le régime. Darafeev a également confronté la directrice de la commission électorale dans une interview qui a provoqué sa colère et conduit à l'interdiction de son émission. Un autre journaliste, Alexeï Laoutchouk, a perdu son emploi pour avoir refusé de rédiger un article diffamatoire contre les manifestants. Ces actes de désobéissance ont montré les fissures au sein même du système médiatique contrôlé par Loukachenko.
La répression a eu des conséquences graves pour l’opposition et les manifestants. Plus de 500 personnes ont été condamnées à des peines de prison, souvent de dix à quinze jours, pour leur participation aux manifestations. Cinq des neuf candidats à la présidentielle et 21 leaders de l’opposition ont été incarcérés à la maison d’arrêt du KGB. Ces leaders ont été officiellement accusés d’avoir organisé des émeutes après l’élection, et risquent de lourdes peines de prison allant de cinq à quinze ans. Cette répression a non seulement étouffé toute forme de protestation contre le régime, mais elle a aussi exacerbé l’isolement international de la Biélorussie, le pays étant accusé de violer systématiquement les droits de l’homme et les libertés fondamentales.
Source de la photo : FIDH, 2021